Réforme du droit des sociétés belge

La loi du 28 février 2019 (entrée en vigueur depuis le 1 mai 2019) a instauré la nouvelle réglementation en matière de sociétés et vise à promouvoir les nouvelle sociétés en rendant le système plus moderne, plus flexible et plus simple.

Quels sont les points forts de cette nouvelle législation ?

1. LA DIFFÉRENCE ENTRE SOCIÉTÉS CIVILES ET SOCIÉTÉS COMMERCIALES DISPARAÎT.

L’ancien code établissait une distinction entre :

les sociétés commerciales ayant un but commercial,

et les sociétés civiles qui n’ont pas de but commercial, tel un cabinet d’avocats.

Le nouveau Code des Sociétés considère toutes les sociétés, associations et fondations comme des « entreprises » qui en tant que telles doivent être inscrites à la BCE (Banque Carrefour des Entreprises) Cela signifie que les sociétés civiles et les associations pourront désormais elles aussi faire faillite. Le tribunal compétent pour toutes ces entreprises est le ‘tribunal de l’entreprise’ (l’ancien “tribunal de commerce”).

2. DE 17 SOCIÉTÉS À 4

De 17 formes juridiques, dont certaines n’avaient leur utilité que pour les mots-croisés et autres quiz – tellement elles étaient tombées en désuétude – il n’en reste que 4 à la portée de tous.´

A. La Société à responsabilité limitée (SRL)

L’ancienne SPRL est devenue la SRL avec plusieurs modifications:

  • la SRL n’exige plus de capital. Il est remplacé par un «patrimoine initial suffisant». Autrement dit, la société doit disposer dès le départ de capitaux propres suffisants pour mener à bien ses activités. Ce nouveau critère reflète mieux la réalité de la nouvelle société: l’exigence de capital n’est plus absolue ou arbitraire, mais peut être adaptée aux besoins réels. L’apport peut également prendre la forme d’une «industrie», d’une idée ou même d’un temps de travail. Des apports en nature sont aussi possibles, sous forme de savoir-faire.
  • plan financier renforcé: étant donné que l’apport d’argent ou de biens n’est plus nécessaire et dans le but de vérifier que le(s) fondateur(s) ont prévu des moyens suffisants pour leur activité, l’établissement du plan financier a été renforcé en démontrant toutes les sources de financement, les bénéfices et les dépenses de la société pour une période d’au moins deux ans après sa constitution. Comme le(s) fondateur(s) reste(nt) responsable(s) de cette exigence pendant deux ans un plan financier bien conçu et bien pensé est plus important que jamais. La loi impose même certains critères à cet effet en définissant des éléments que le plan doit absolument contenir.

Le notaire recevra le plan financier lors de l’acte de constitution et il vérifiera si celui-ci répond à tous les critères légaux mais sans s’occuper des chiffres avancés.

  • réduction du nombre d’actionnaires: le nombre d’actionnaires a été réduit passant de deux à un seul. Ce dernier peut être une personne morale ou physique
  • modification lors de la distribution de bénéfices ou de réserves. Afin que la responsabilité des administrateurs ne soit pas engagée, la distribution de bénéfices ou de réserves n’est possible que si l’actif net ne devient pas négatif et si toutes les dettes dues peuvent être remboursées sur une période de 12 mois.
  • la SRL devient beaucoup plus flexible: toutes les catégories de titres (à l’exception des parts bénéficiaires) peuvent être émises. En plus le choix existe d’octroyer pour chaque type d’action le nombre de voix que l’on souhaite (néant, 1 seule ou plusieurs)
  • les actions peuvent désormais être cédées plus facilement grâce à l’allégement des règles.

B. Société anonyme (SA)

  • La SA reste soumise aux règles européennes en matière de capital et restera la forme de société de référence pour les grandes sociétés et les sociétés cotées.

Le capital de départ de 61.500 euros est maintenu.

  • Renforcement de la position de “figure clé”. Avec la nouvelle loi, une SA peut avoir un administrateur unique, contre trois précédemment. En outre, il devient presque impossible d’écarter cet administrateur. Ce changement ouvre de nouvelles possibilités de transferts familiaux. Des actions peuvent déjà être données aux enfants tandis que “le pater familias” est désigné comme seul administrateur. Il est presque impossible pour les enfants de licencier leur père/mère vu que l’acte de constitution peut contenir un droit de veto. Les statuts peuvent même désigner un successeur en cas de décès de l’administrateur unique.
  • Peut être constituée par un seul actionnaire
  • Actions librement cessibles.
    • Au moins « 1 action avec 1 voix ».
    • Dans une SA et une SRL, les actions peuvent être émises avec droit de vote multiple
    • En principe, chaque action donne droit à une voix. Toutefois, les statuts peuvent déroger à ce principe pour les :

actions avec droit de vote multiple

actions sans droit de vote

actions avec droit de vote dans certaines conditions seulement.

C. Société coopérative (SC)

  • Capital de base: néant.
  • En revanche, des capitaux propres de départ suffisants sont requis ( voir SRL)
  • Le minimum de 3 fondateurs est maintenu.
  • Actions pas librement cessibles.

Ce type de société convient aux entreprises dont le but principal est de répondre aux besoins des actionnaires ou de développer leurs activités économiques et sociales.

D. La société simple (SS)

  • Capital néant. Les biens apportés constituent le patrimoine indivis.
  • Au minimum deux associés.
  • Actions nominatives et non cessibles (sauf convention contraire).

Attention: création simple, mais plus risquée en raison de la responsabilité personnelle et illimitée

3. LIMITATION DE LA RESPONSABILITÉ DES ADMINISTRATEURS
La responsabilité des administrateurs en cas de faute sera limitée à un certain plafond, dont le montant maximum dépendra du bilan total et du chiffre d’affaires de la société durant les trois dernières années. Attention, cette limitation n’est pas valable pour les dettes fiscales ou sociales, la fraude fiscale grave, les petites fautes légères répétées ou faute grave, et pour toute intention de fraude.

4. INTRODUCTION DU SIÈGE STATUTAIRE

Par cette mesure, le législateur souhaite augmenter l’attractivité de la Belgique en tant que pays d’implantation pour les entreprises internationales. Pour ce faire, les mesures suivantes sont prises :

  • Le droit des sociétés s’applique dans le pays où est établi le siège statutaire.
  • Les déplacements transfrontaliers sont simplifiés, le droit national des sociétés applicable étant plus clair.
  • Le déplacement du siège a uniquement des conséquences pour le droit des sociétés. Par exemple, le droit fiscal, le droit social, le droit d’insolvabilité et le droit environnemental ne changent pas.
  • Une société belge peut déplacer son siège statutaire dans un autre pays et ainsi adopter la loi du pays en question.
  • Les statuts doivent mentionner explicitement la région du siège. Un déménagement au sein de la même région peut donc se faire par une simple décision de l’organe d’administration.

5. LA RÉFORME S’APPLIQUE AUSSI AUX SOCIÉTÉS ET ASSOCIATIONS EXISTANTES.

Il va de soi que la loi prévoit des mesures intermédiares jusqu’au 1 janvier 2024 pour adapter les sociétés existentes au nouveau régime. Comme leur discussion dépasserait le cadre de la présente introduction, l’auteur se tient à votre disposition pour toute question quant à ce.